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Séries Craignos

Pompéi, Des Cendres Un Héros Se Lèvera

Des grandes maisons ocres, des esclaves qui agitent des feuilles pour faire du vent, des robes drapées, des gladiateurs enveloppés dans leurs filets … Wouai! Un péplum. Vous me direz que le titre de la mini série, Pompéi, indique clairement le genre? Faux. Les créateurs auraient pu développer une fiction historique.

Mais non, on est bel et bien devant le genre le plus kitsch jamais inventé en audiovisuel. Et… on n’est pas déçu. Entre approximations historiques, costumes de pacotilles, décors limités, grosses ficelles scénaristiques et effets pyrotechniques low cost, je ne sais où donner de la tête.

La séquence d’ouverture est déjà emblématique. Nous sommes à Naples aujourd’hui dans un groupe de touristiques qui admirent le Vésuve depuis un point panoramique. Et la terre tremble (enfin, le cameraman est pris de hoquets, mais on fait semblant qu’on n’a rien vu). Ouh que c’est menaçant! D’ailleurs tout le monde panique, remonte dans le bus et les voitures démarrent en trombe. Genre: on sera plus à l’abri sur l’autoroute. Ben voyons. Cut.

On se retrouve à Skopje en Macédoine avec Harold Mann, volcanologue, qui constate une activité anormale sur un cratère. Oh, oh, mais que se passe-t-il si tous les cratères européens s’agitent en même temps? Ca ressemble furieusement à un début de film catastrophe, non? Oui, mais un film catastrophe bavard, où la moitié des phrases ne servent à rien. Par exemple, le scientifique déclare qu’ « il y a une intense activité gazeuse conséquente ». Intense et conséquente dans la même tirade, c’est que ça doit être grave.

La séquence commence par une déclaration de son assistant qui établit qu’ils ont décidé de partir rapidement, mais juste après le scientifique semble avoir décidé qu’il allait prendre des mesures. Courageusement, il décide d’y aller et son assistant est d’accord, « oui, vas-y » lui dit-il. Deux secondes plus tard, ils y vont pourtant tous les deux. La dernière phrase de l’assistant tombe aussi à plat, quand il se dit fatigué. Je ne résiste pas à vous laisser profiter de ce moment tout en sobriété dialoguée.

Il n’y a pas que les phrases qui ne mènent nulle part dans Pompéi. Juste après avoir pris les mesures, Pedro, l’assistant, glisse. Tada! Musique angoissante, pourtant il ne dérape que d’un mètre sur une pente relativement douce, ce qui ne l’empêche pas de se demander s’il n’a pas la jambe cassée. Heureusement, il marche presque sans boiter et ils ressortent du cratère. Pourquoi ce suspens à deux centimes? Heu, pour rien.

Sur ces entre-faits un hélicoptère débarque, inconnu. Deux hommes en descendent, habillés comme les Men In Black. Ce sont des agents du gouvernement italien, on n’en saura pas plus. Ils demandent à Harold de les suivre ce qu’il fait sans poser de questions, sans vérifier les accréditations des deux gars, sans s’inquiéter de son matériel et de son propre moyen de transport (car il n’est probablement pas arrivé là à pied).

Toute la séquence ne sert pas vraiment à grand chose non plus, à part établir le fait qu’Harold est un volcanologue. En fait, on n’est pas du tout à deux doigts de la catastrophe continentale, les volcans ne se réveillent pas du tout, ni à Naples, ni à Skopje et cette petite tension autour de l’activité gazière « intense » et « conséquente » n’est jamais réutilisée dans la mini-série. Ca commence bien donc.

Après 6 minutes de série, on entre dans le vif du sujet. Flashback. Nous voici à Pompéi en 79 après Jésus Christ. Et les producteurs ne nous épargnent pas grand chose. On a des personnages stéréotypées: l’esclave trop intelligente pour être esclave, l’esclave trop belle pour être esclave, le consul trop méchant, la soeur du consul trop perverse, le vendeur d’esclaves trop cynique, le gladiateur trop héroïque et surtout trop invincible…

On a des intrigues courues d’avance: le gladiateur qui tombe amoureux de l’esclave intelligente, mais la soeur du consul le veut juste pour sa consommation personnelle ; le consul qui tombe amoureux de la belle esclave qui ne l’aime pas ; la princesse qui tombe amoureuse d’un esclave parce qu’on est tous des êtres humains avant tout ; le devin aveugle ; l’entraîneur de gladiateurs plus humain que prévu…

On a aussi les passages obligés: le gladiateur rebelle qui se fait fouetter mais qui n’a pas de marque, la scène de banquet romain où on mange du raisin, la scène de combat de gladiateurs sans hémoglobine ajoutée, la scène sur le forum où on prédit la catastrophe, la scène de combat entre le méchant et le héros et la scène de panique parce qu’il pleut des cendres, scène qu’on subit à intervalle régulier pendant facilement une heure trente car il prend du temps pour exploser le Vésuve. Et à chaque fois on a droit à la même musique grandiloquente et péplumesque qu’on doit à un certain Giovanni Bacalov. C’est pas donné à tout le monde d’être Sergio Leone.

Mais n’allez pas croire que Pompéi n’innove pas. D’abord, on croise l’histoire de l’éruption avec la persécution des chrétiens. De manière peu subtile même. En gros, on emprisonne les Chrétiens car le consul pense qu’ils complotent contre Rome et au moment où on va les crucifier, bam, le Vésuve se réveille. On remballe les croix. Quand le volcan s’est calmé, on reprend les exécutions et, re-bam, le Vésuve se re-réveille cette fois pour de bon.

Puis, on établit un lien entre les amoureux de l’Antiquité et ceux d’aujourd’hui. Lien de nouveau assez léger sinon c’est pas drôle. Le volcanologue, Harold Mann, n’est pas le plus fin des types. Après deux secondes, il remarque déjà qu’il ne savait pas que le professeur Angeli avait une aussi jolie assistante. Et l’assistante en question roule les yeux bieeeen au ciel pour montrer sa désapprobation. Deux minutes plus tard, déclaration enflammée et lourde de la part du même Harold et même réticence appuyée de Patricia.

Une fois qu’on revient au présent, après l’histoire de Pompéi, comme par enchantement, ils s’entendent bien. Pourtant, on doit être quelques chose comme dix minutes plus tard, le temps que l’assistante ait raconté l’histoire. Patricia déclare qu’elle ne l’aimait pas au début mais qu’elle s’est trompée sur lui. Ils regardent le coucher du soleil sur les ruines de la cité et emballé c’est pesé.

Je vous en passe et des meilleures comme ces voix qui servent en même temps pour les clameurs du public et les gémissements des gladiateurs, les regards appuyés entre personnages qui signifient qu’ils sont amoureux, les chrétiens qui parlent de la liberté du royaume de Dieu et qui se font écraser par une statue en feu deux secondes plus tard (tiens, ça brûle les statues en marbre?), les gens affolés qui font des allers et retours sur le forum ou qui tournent en rond autour du forum plutôt que de fuir la ville, le gentil gladiateur qui conseille aux prisonniers chrétiens de ne pas sortir de la prison parce que « maintenant l’air est irrespirable », mais qui sort quand même, qui parvient à respirer et qui survit. Les Chrétiens, ça ne rate pas, meurent écrasés sous les gravats.

En même temps, fallait pas attendre l’extase d’une série dont le titre, Pompéi, s’inscrit à l’écran lors du générique en lettres romaines oranges et qui partent en fumée l’instant d’après. On vous aura prévenu!

En quelques mots...

Sarah Sepulchre
Alexandre Marlier

Pompéi

Les derniers jours des habitants de Pompéi façon peplum.

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Crédits Photos:
Janus MediaNimar Studio

Sarah Sepulchre

Sarah Sepulchre est professeure à l’Université de Louvain (UCL, Belgique). Ses recherches portent sur les médias, les fictions, les cultures populaires, les gender studies et particulièrement sur les représentations, les liens entre réalité et fiction. Sa thèse de doctorat était centrée sur les personnages de séries télévisées.

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