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Who's Who

Aaron Spelling

C‘est rare qu’on annonce le décès d’un producteur de séries télé au JT en Europe. Celui d’Aaron Spelling a pourtant fait l’actualité, en bref, mais tout de même. C’était probablement l’un des créateurs de séries les plus connus du grand public. En partie à cause des ragots racontés sur sa fille, Tori. Ces histoires sordides ne se sont d’ailleurs pas arrêtées après son décès puisqu’on ne parle que de son testament et du fait qu’elle ait été déshéritée.

Dans les dépêches qui ont annoncé son trépas, après les détails d’usage: il est mort des suites d’une attaque cérébrale survenue le 18 juin 2006, il était entouré de sa femme Candy et de son fils Randy, il était né à Dallas en 1923 et avait donc 83 ans.

Après les détails d’usage donc, c’est directement à son parcours exceptionnel qu’il était fait référence. Aaron Spelling, c’était le producteur consacré comme le plus prolifique par le Guinness Book des records. Tous les sites ont repris les chiffres faramineux: 5.000 heures de programme télé, 300 heures de téléfilms et une douzaine de films de cinéma. Aaron Spelling a signé plus de 200 séries télé.

Sa fortune, sa fille, il n’en fut cependant pas question lors de la dernière cérémonie des Emmy Awards. Personne n’a non plus étalé les chiffres. Pour rendre hommage à l’homme de télévision, ce n’est rien moins que Joan Collins, Heather Locklear, mais surtout Kate Jackson, Farrah Fawcett et Jaclyn Smith – ses trois Drôles De Dames qu’on n’avait plus vues ensemble depuis des années – qui se sont rassemblées sur la scène. La brochette d’actrices est déjà représentative du travail d’Aaron Spelling. Il savait, mieux que tout autre, repérer celles qui deviendraient des stars.

Elles ont célébré « leur ami et patron », le « magnat gentil ». Kate Jackson a souligné son sens de l’alchimie, son don pour sentir le public. Et en effet, Spelling sentait intuitivement ce qui allait marcher auprès des foules. Interrogé par Associated Press sur la facilité de ses oeuvres et les critiques qui lui étaient opposées, il a lui-même répondu qu’il avait fait un choix entre plaire à 300 critiques ou à 30 millions de téléspectateurs. On ne peut vraiment pas lui reprocher sa stratégie.

Mais si on gratte un peu, il n’est pas certain que Spelling n’ait été qu’un producteur de facilité. Il ne faudrait pas trop vite oublier qu’il a offert le premier job de flic à une femme dans The Rookies, puis à un trio de femmes, les Drôles De Dames. C’est lui aussi également qui a dépoussiéré le policier. Quand il propose Starsky et Hutch en ’74, les détectives sont à peu de chose près des clones de Sherlock Holmes. Observant, réfléchissant, tirant des conclusions. Avec lui, les flics sortent dans la rue, côtoient les criminels et agissent.

Il invente alors pratiquement le phénomène des guest stars avec La Croisière S’Amuse et L’Île Fantastique. Il fait entrer le soap opera dans l’ère rutilante avec Dynastie. Dans les années ’70, Spelling est impertinent et novateur. Depuis, il s’était un peu essoufflé, c’est vrai. Il proposait principalement des soap opera.

Beverly Hills 90210, Melrose Place, ses dernières créations ne brillent pas vraiment par l’intelligence du propos. Certaines ne marchent d’ailleurs pas comme The Street ou Titans. Charmed et Sept A La Maison restaient ses derniers fers de lance. L’une comme l’autre véhiculent une certaine idée de la spiritualité, qu’elle soit magique ou religieuse. L’une comme l’autre réaffirment les valeurs familiales. Aaron Spelling était devenu un classique, peut-être un peu trop classique. Mais peut-on reprocher à un homme de 80 ans d’être classique?

Il est devenu célèbre en Europe grâce à Beverly Hills 90210. Au moment où le vieux continent se rend compte que les séries télévisées sont des fictions dignes de ce nom et non du remplissage entre deux programmes. Il sévit pourtant depuis très, très longtemps aux Etats-Unis.

Il met en scène des productions théâtrales depuis l’université et il reçoit déjà des prix. Sa première apparition date de 1954. Il était alors acteur et il s’agissait d’un épisode de Dragnet. Son premier rôle régulier est signé également cette année, c’était pour la série Willy. S’il passe rapidement à l’écriture et à la production, il tiendra toujours des petits rôles par-ci par-là comme dans Sunset Beach en ’98.

C’est en 1956 qu’il vend son premier scénario à l’acteur Dick Powell, le directeur de la Four Star Films. Il restera associé pendant plus de 10 ans à cette maison de production. La première série qu’il a créée s’intitule Johnny Ringo en 1959. En 1967, il s’associera alors avec Danny Thomas avec qui il produira La Nouvelle Equipe, puis avec Léonard Golberg sur Starsky Et Hutch et Drôles De Dames. Dès les années ’80, il prend seul les commandes de la puissante Aaron Spelling Productions.

Alors, oui, les innovations scénaristiques et visuelles ne venaient plus de lui. Oui, il n’a probablement pas senti, pour une fois, la demande du public pour des fictions plus exigeantes, plus HBO et moins strass et paillettes. Mais Aaron Spelling a posé les jalons de la télévision d’aujourd’hui. Il a franchi des pas importants pour la fiction télévisuelle. Il n’est peut-être pas le créateur de séries le plus incontournable, mais il fait incontestablement partie du top 10.

Crédits Photos:
Aaron Spelling ProductionsDouglas S. Cramer CompanyThe Love Boat Company

Sarah Sepulchre

Sarah Sepulchre est professeure à l’Université de Louvain (UCL, Belgique). Ses recherches portent sur les médias, les fictions, les cultures populaires, les gender studies et particulièrement sur les représentations, les liens entre réalité et fiction. Sa thèse de doctorat était centrée sur les personnages de séries télévisées.

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