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Dossiers Séries

Drôles De Dames

On pourrait avoir l’impression que Drôles De Dames est une série policière anodine et pourtant quelques éléments intéressants nous permettent de vous en parler un peu plus longuement, entre libération de la femme, mise en avant de la plastique des actrices et soumission au grand patron qu’on ne voit jamais. Décryptage de cette série signée Aaron Spelling dans les années ’70.

Une série qui bouscula le petit écran

Selon des analystes comme Eric Contant et Philippe Gourdeau, le succès immédiat qu’a remporté cette série et les changements qu’elle occasionna dans l’espace audiovisuel en font une œuvre culte.

Je m’explique: le pilote fut diffusé le 21 mars 1976 sur ABC. Dès la première semaine, Drôles De Dames pulvérisa le Top 10. Chaque mercredi soir à 22 heures, plus de 40 millions d’américains suivaient les aventures des détectives féminins. Sur les trois actrices qui débutèrent aux côtés de Bosley, deux étaient des inconnues.

En quelques mois, elles firent la une de tous les journaux. Farrah Fawcett-Majors, surtout, devint la coqueluche de toute l’Amérique. Elle se retrouva en couverture de tous les magazines de télé et de cinéma. Elle vendit 16 millions de posters, t-shirts et poupées à son effigie. Elle devint un modèle pour toutes les jeunes filles. C’est elle qui a lancé la coiffure « à la lionne ». Revoyez le film « Quand Harry Rencontre Sally » de 1987, même Meg Ryan y a succombé!

Les trois dames apparurent en couverture du Time qui titrait TV’s Super Women. C’était la première fois que ce magazine consacrait sa une à une série télé. Drôles De Dames semble donc bien avoir été un phénomène de société. En tous cas, une grande partie de la population y trouva des modèles auxquels s’identifier.

Cette série policière possède tous les ingrédients qui contribuent au charme et au plaisir d’un épisode de soap. Drôles De Dames n’évite ni le kitsch, ni le mauvais goût, ni l’invraisemblable d’une bonne série. Aaron Spelling, son créateur, est d’ailleurs le chef incontesté du genre (La Croisière S’Amuse, Dynastie, L’Ile Fantastique, Beverly Hills 90210, Melrose Place,…).

Seulement, Drôles De Dames reçut un accueil exceptionnel de la part du public. Mais en plus, elle transforma le monde des séries de l’époque (les seventies). Aaron Spelling et Léonard Goldberg, les producteurs de « The Rookies », « Starsky et Hutch », « SWAT », voulaient ajouter un peu de charme et de glamour aux séries policières du moment. Le pari n’était pas minime car, à l’époque, les hommes avaient le monopole.

Jusqu’alors les femmes étaient des éléments du décor, les faire-valoir des interprètes masculins. Elles jouaient les victimes: veuves, orphelines, femmes battues, violées, prostituées ou les secrétaires et assistantes effacées.

Une exception existe: Chapeau Melon Et Bottes De Cuir. Mais il s’agit d’une série britannique et non américaine. Une timide avancée est produite avec le rôle d’Angie Dickinson dans « Police Woman » (Sergent Anderson), en 1974, où elle joue une femme flic. Le personnage n’apportait cependant aucun changement profond: il s’agissait d’une femme dans un rôle d’homme. Cette série constitua pourtant un pas décisif. Elle inspira beaucoup Spelling et Goldberg.

Notons que des séries comme « Bionic Woman » et « Wonder Woman » mettent également en scène des héroïnes mais il s’agit de séries nettement fantastiques ou tirées de BD et cela n’a rien à voir avec la réalité.

Le monde de la TV était, à l’époque, assez misogyne et il réagit, de prime abord, assez mal au concept développé par Spelling et Goldberg. Les dirigeants d’ABC refusent la série. C’est grâce à Fred Silverman que le projet voit le jour. Le nouveau président des programmes d’ABC donnera, en effet, une seconde chance au projet.

Drôles De Dames: libération ou esclavage?

Avec Drôles De Dames, des femmes accèdent pour la première fois à un rôle policier complet. Ces trois femmes font aussi bien que les hommes. Elles sont détectives, manient le revolver et les sports de combat. Leurs rôles sont très physiques. Elles parviennent également à apporter humour et fantaisie au téléspectateur sans oublier le côté glamour de la série.

Ce côté sexy a d’ailleurs amené quelques problèmes aux actrices. D’abord, les machos ne leur ont pas rendu la vie facile. Par exemple, elles ont dû se justifier de ne pas porter de soutien-gorge sous leurs t-shirts. D’un autre côté, les mouvements féministes accusaient les rôles « poupées Barbie » auxquels étaient confinées les trois actrices.

Libération de la femme oblige, le côté femme au foyer/mère modèle est absent de la série: pas de mari, pas d’enfant. Pour preuve, Sabrina divorce pour travailler pour Charlie. Mais on peut parfois se demander si elles étaient si libérées que cela.

Quelque part, elles sont au service de Charlie et il n’a rien de l’homme modèle. C’est un Don Juan entouré d’un harem. On le voit souvent installé près d’une piscine entouré de créatures de rêve. Les Drôles De Dames sont prêtes à tout pour satisfaire Charlie qu’elles rêvent de voir. Ce patron utilise d’ailleurs le charme et les qualités sexy de ses employées pour résoudre ses enquêtes. Le côté glamour de la série a été utilisé énormément. A tel point qu’on pourrait se demander si une part de l’audimat ne s’arrêtait pas à ça!

Un autre élément peut également démontrer que si Drôles De Dames fait un pas en avant, celui-ci n’est pas vraiment un pas de géant. Il s’agit de la nature des enquêtes elles-mêmes. En effet, il est fréquent que les détectives de charmes investiguent dans les milieux de la mode, de la prostitution, du showbiz, des classes fortunées. Les trois dames se déguisent souvent en pom-pom girls, hôtesses de l’air, miss,… Bref, elles sont cantonnées à des milieux où les femmes se doivent d’être jolies mais silencieuses!

Malgré tout, cette série a apporté un vent neuf dans l’univers de la TV. Elle a, en effet, ouvert la route à des séries comme « Flying High » (Embarquement Immédiat) par exemple, une série racontant les mésaventures de trois hôtesses de l’air « torturant » leur pilote. Les femmes détectives aussi se sont multipliées, avec plus ou moins de succès: « Madame Columbo », « Hart To Hart » (Pour L’Amour Du Risque), « Remingston Steele » ou encore « Murder, She Wrote » (Arabesque) dans un style moins « sexy ».

De même, dans les duos de flics, les rôles des femmes se sont étoffés (Stacy dans Hooker, Dee Dee McCall dans Rick Hunter, Cagney et Lacey). Les femmes ne sont donc plus réellement de jolies secrétaires stupides et asservies.

Des trios très soudés

Le succès d’une série tient à beaucoup de choses: le scénario, les décors, la mentalité du moment, l’originalité, etc… Dans ce succès, les relations entre les personnages et l’adéquation entre les acteurs sont des éléments capitaux. Or, comme toute série qui a marché, Drôles De Dames a su tirer le meilleur parti du jeu des comédiens.

L’équipe de Charlie regroupe Jill Munroe (Farrah Fawcett-Majors), Kelly Garreth (Jaclyn Smith) et Sabrina Duncan (Kate Jackson). Jill Munroe sera remplacée par sa soeur, Kris Munroe (Cheryll Ladd). Sabrina Duncan laissera sa place à Tiffany Welles (Shelley Hack) puis à Julie Rogers (Tanya Roberts).

  • Jill Munroe: elle est la blonde, sportive, bricoleuse, rusée. Elle quitte l’Agence Townsend pour se consacrer à sa passion, la course automobile.
  • Kelly Garreth: elle est texane et orpheline. Son enfance ne fut pas très heureuse. Elle a travaillé comme serveuse et danseuse avant de s’engager dans la police. Elle est celle qui s’occupe le plus des malheureux.
  • Sabrina Duncan: c’est l’intellectuelle du trio. Elle parle plusieurs langues, connaît l’art et la gastronomie asiatique sur le bout des doigts. Elles est divorcée de Bill Duncan. Elle quittera l’agence pour se remarier avec lui et fonder une famille.
  • Kris Munroe: la soeur de Jill a fait l’académie de police alors que tout le monde la croyait à l’université. Elle est un peu loufoque, un peu irréfléchie et vulnérable. C’est son sens de l’humour et ses exploits sportifs qui la sauvent de certaines situations plutôt risquées.
  • Tiffany Welles: elle est la fille d’un des plus vieux amis de Charlie. Raffinée, cultivée (elle parle couramment le latin et le grec), elle est plutôt sérieuse et effacée.
  • Julie Rogers: c’est la seule à ne pas avoir suivi les cours d’une école de police. Elle était mannequin en galère avant d’intégrer l’équipe.
  • John Bosley: il est le bras droit de Charlie, le seul de l’équipe qui l’ait vu. Il aide quelques fois les filles mais sert surtout de relais entre le trio et le patron. Il sait être grincheux même s’il est un bon vivant.
  • Charles Townsend: ancien privé, il s’est retiré des affaires. Il donne ses ordres par téléphone. Les enquêtes qu’il confie aux filles lui viennent souvent d’amis. Ses relations sont d’ailleurs nombreuses autant dans le « milieux » que dans la police. Il est toujours très bien entouré!

Les drôles d’actrices

Le groupe de personnages semble donc bien soudé. Il en va de même pour les acteurs. Par exemple, quand Kate Jackson épouse Andrew Stevens en 1978, Farrah est son témoin. Il est d’ailleurs étonnant d’examiner leurs parcours individuels: ils se ressemblent très fort.

Farrah, Jaclyn et Kate sont nées en 1947 et 1948. Cheryl, Shelley et Tanya ont aussi plus ou moins le même âge. La plupart ne sont pas venues directement au métier d’actrice. Farrah a d’abord tenté sa chance en microbiologie. Jaclyn, qui se destinait à être ballerine, a galéré à l’université (en psychologie). Kate Jackson a toujours joué mais elle est aussi passée par un an d’histoire à l’université du Mississippi. Cheryl fut d’abord chanteuse dans un groupe du Dakota « The Music Shop Band ». Shelley est la seule à avoir décroché un diplôme universitaire: archéologie. Finalement, seule Tanya n’a pas tenté sa chance ailleurs.

Toutes sont passées par le mannequinat et la pub, surtout pour des produits de beauté (Ultra Brite, Wella Balsam, Max Factor, Camey, Clairol, …). Mise à part Kate Jackson qui a joué dans « The Rookies », une autre série de Spelling, toutes en étaient à leur premier rôle important.

Après Drôles De Dames, elles auront toutes des difficultés à mener leur carrière. Farrah a tourné dans quelques films TV (dont « On A Tué Mes Enfants »), Jaclyn a monté une maison de production et a créé sa propre ligne de vêtements. Cheryl et Shelley se consacrent à leur famille. Finalement seule Kate apparaît encore à l’écran (elle joue notamment dans le troisième épisode d’Ally McBeal). Elle avait notamment décroché un rôle principal pour la série « Les Deux Font La Paire ».

Leurs vies sentimentales ressemblent tout à fait à leurs vies professionnelles: chaotiques. Elles ont toutes un ou deux divorces à leur actif, voir plus. Pour la petite histoire, Kate Jackson a eu une brève liaison avec l’acteur Warren Beatty. Farrah est pour sa part sortie notamment avec Ryan O’Neal, l’acteur de « Love Story » avec qui elle aura un fils. Elle a été mariée à Lee Majors (« L’homme Qui Tombe A Pic »). Farrah Fawcet est décédée en 2009 des suites d’un cancer.

Finalement, la série qui leur a apporté la gloire les a aussi enfermées professionnellement (elles seront toujours des ex-Drôles De Dames) et sentimentalement (leurs divorces sont souvent la conséquence de leur succès avec la série).

Drôles De Dames: Les retours

Les Drôles De Dames n’ont pas fini de faire parler d’elles. En 1988 déjà, Spelling a tenté de faire revivre la magie avec « Angels 88 ». Cette série racontait l’histoire de quatre actrices d’une série policière qui se retrouvaient au chômage et qui décidaient de créer une agence de détectives. La série ne verra finalement jamais le jour.

En 1991, il a proposé aux actrices de Drôles De Dames de se retrouver pour tourner un téléfilm. Cheryl, Jaclyn, Kate, Shelley, et Tania ont accepté mais Farrah a refusé. Ce qui a probablement plombé le projet.

Nouvelle tentative en 2011 sur ABC, avec un casting totalement renouvelé. Las, le public ne suit pas et la série est rapidement annulée. Seuls 7 épisodes seront produits et diffusés sur les 13 commandés au départ.

C’est du côté du cinéma que les reboot de la série ont le mieux fonctionné. En 2000 est sorti Charlie’s Angels, une adaptation assez moyenne produite par le studio Columbia Pictures. Le casting officiel de l’adaptation cinéma intitulé en français « Charlie Et Ses Drôles de Dames » est presque totalement renouvelé par rapport à la série. Excepté John Forsythe qui reprend le rôle (la voix) de Charlie, aucune des anciennes comédiennes de la série n’a été associée au projet.

Le public se passera de Farrah Fawcett, Kate Jackson ou de Jaclyn Smith puisque les jeunes et heureuses élues sont Drew Barrymore, Cameron Diaz et Lucy Lyu. L’écriture du scénario a été confiée à Ed Solomon, le scénariste du film « Men in Black ». Une suite a également été tournée: « Les Anges Se Déchaînent« .

En quelques mots...

Sarah Sepulchre
Alexandre Marlier
Nathanaël Picas
Sophie Sourdiaucourt
Tilman Villette

Avis global

Elles sont trois, elles s'encroûtaient dans leurs professions respectives. Charlie les a engagées comme détectives privées. Même si elles restent glamour et sous la coupe de leur patron, les Drôles De Dames sont parmi les premières héroïnes d'action de la télévision.

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Dossiers Séries

La Fiche Série

Titre Original:
Charlie’s Angels
Durée:
115 épisodes de 47 minutes, soit 5 saisons + 1 épisode pilote de 70 minutes
Pays d’origine:
USA
Chaîne(s) de 1ère diffusion:
ABC
Période(s) de diffusion:
Du 26 mars 1976 au 24 juin 1981
Genres:
Policier, Enquêtes
Créé par:
Ivan Goff, Ben Roberts
Producteurs exécutifs:
Aaron Spelling, Leonard Goldberg
Produit par:
Spelling-Goldberg Production
John Forsythe:
Charlie Townsend
Jaclyn Smith:
Kelly Garrett
Kate Jackson:
Sabrina Duncan
Farrah Fawcett-Majors:
Jill Munroe
David Doyle:
John Bosley
Cheryl Ladd:
Kris Munroe
Shelley Hack:
Tiffany Welles
Tanya Roberts:
Julie Rogers

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Bibliographie

  • CONTANT Eric, GOURDEAU Philippe, Drôles de Dames – Entre féminisme et sexisme, Ed. DML. Coll. : Guide du téléfan
  • Génération Séries, n°34, octobre-novembre-décembre, 2000 (guide des épisodes)
  • HOFSTEDE David (ed. et al.), The Charlie’s Angels, Case Book, Pomegranate Press, Beverly Hills, 2000, 336p. Préface de Jaclyn Smith.

Crédits Photos:
Spelling-Goldberg Production

Sarah Sepulchre

Sarah Sepulchre est professeure à l’Université de Louvain (UCL, Belgique). Ses recherches portent sur les médias, les fictions, les cultures populaires, les gender studies et particulièrement sur les représentations, les liens entre réalité et fiction. Sa thèse de doctorat était centrée sur les personnages de séries télévisées.
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