Séries Mania 2019: Episode 6
Dernier Supplément Red Carpet de cette édition 2019 du festival Séries Mania. Vendredi avait lieu la projection en avant première de la saison 2 de la série documentaire de notre consœur d’OCS Charlotte Blum. The Art Of Television met en avant les grands réalisateurs de séries télévisées. Et cette 2ème saison revient sur 4 d’entre eux étant passés d’un écran à l’autre. Trois des quatre épisodes étaient présentés en exclusivité. Ils étaient consacrés à Judd Apatow, Vincenzo Natali et Michel Gondry.
Du côté des séries en compétition, la britannique Baghdad Central était présentée en première mondiale au Nouveau Siècle. Cette série de 6 épisodes pour Channel 4 se déroule en Irak. Nous sommes en octobre 2003, après la chute de Saddam Hussein. Alors que les américains et les britanniques tentent de sécuriser le pays, Bagdad est plongée dans le chaos. Mushin, ex-policier a tout perdu et doit malgré tout protéger ses deux filles dont la plus jeune qui est gravement malade. Son aînée disparaît alors et Mushin se voit contraint de travailler pour les forces alliées afin de comprendre ce qui lui est arrivé et tenter de la retrouver.
Si la série à le mérite de prendre un angle assez original pour traiter son sujet, force est de constater que la manière reste malgré tout assez conventionnelle. La série reste plaisante à regarder, mais des incohérences, ou en tous cas des choix formels sont un peu incompréhensible comme le fait que les personnages principaux, tous irakiens de souche, parlent entre eux en anglais, alors qu’ils parlent à d’autres personnages en arabe. Les spectateurs du Nouveau Siècle ne s’y sont d’ailleurs pas trompé et ont même posé la question au scénariste Stephens Butchard, présent lors de cette présentation. Si sa réponse est logique, puisqu’il évoque la cible de la série essentiellement anglophone puisque destinée à Channel 4, je n’ai personnellement pas été convaincu à 100 %. Dommage, car ce détail gâche le plaisir qu’on à a regarder Baghdad Central.
Après la déconvenue de Marseille et la trop classique Plan Cœur, Netflix était attendue au tournant avec sa nouvelle production française: Osmosis. Et il faut dire que la plate-forme de streaming avait mis le paquet lors de ce festival avec un stand consacré à la série au Tripostal. Pour rappel, Osmosis est l’adaptation d’une websérie produite à l’époque pour Arte Creative ou un site de rencontre en réalité augmentée permet de trouver à coup sur son âme sœur grâce à un algorithme révolutionnaire. La version Netflix part sur les mêmes bases, avec une application de rencontre, jumelée à des micros robots implantés dans le cerveau permettant de trouver le grand amour. L’histoire, (re)créée par Audrey Fouché débute alors que le beta test va démarrer mais que les investisseurs lâchent Osmosis. Il faut donc presser le test, au risque de déraper. D’autant que tous les cobayes ne sont pas forcément ce qu’ils disent être et que les deux créateurs de l’application Esther et Paul Vanhove vivent tous deux sur un mensonge…
J’avais été particulièrement enthousiasmé par la websérie d’Arte lors de sa diffusion, l’idée était fun et dans l’air du temps, le tout était réalisé de manière assez intelligente malgré un certain manque de moyen. Et puis Netflix est arrivé avec ses gros sabots. Et en a fait cette série qui n’est franchement pas une réussite. Déjà, une série d’anticipation aux décors cliniques, blancs, parsemés de néons et de béton, on a l’impression d’avoir déjà vu cela 100 fois. Et puis, l’application, si elle était au cœur de la websérie, n’est plus ici qu’un prétexte pour jouer avec les personnages. Personnages qui, soit dit en passant sont tous plus antipathiques les uns que les autres, impossible de s’attacher à l’un d’entre eux, quel qu’il soit, tellement le portrait brossé est désagréable. Tout ceci pour nous emmener vers la grande révélation finale, le grand mensonge sur lequel la vie d’Esther et Paul vacille. Bref, on s’éloigne très fort du sujet de départ pour finalement quelque chose de très froid, sans sentiment, sans état d’âme et probablement sans beaucoup d’intérêt. Une fois de plus, Netflix se loupe avec ses productions françaises. Dommage car il y avait du potentiel et les acteurs sont loin d’être mauvais.
Et puis samedi était jour de cérémonie de clôture et de l’annonce du palmarès. Mais d’abord une table ronde de nos confrères de l’Association des Critiques de Séries au titre provocateur: les séries françaises manquent-elles de style? Durant une bonne heure, Marianne Behar (l’Humanité), Renan Cros (France Inter), Pierre Langlais (Télérama) et Guillaume Nicolas (AlloCiné) ont débattu sur les différentes approches esthétiques des séries française, de l’image à la réalisation en passant par la musique et le montage. Et le constat n’est pas toujours réjouissant, même si quelques pépites sortent du lot.
Juste après, il fut question de la nouvelle itération de la série d’anthologie culte « The Twilight Zone » (La Quatrième Dimension) qui revient sur la plate-forme de streaming CBS: All Access, portée par l’acteur et réalisateur Jordan Peele qui tient le rôle du narrateur et est également l’un des producteurs exécutifs de la série. Et c’est l’acteur Adam Scott qui était l’ambassadeur de la série et qui s’est prêté au jeu des questions réponse avec le public venu très nombreux. Adam Scott qui joue le rôle principal dans le second épisode « Cauchemar à 20000 pieds », une relecture d’un épisode culte de la série, porté à l’époque par William Shatner.
Au final, la série est assez plaisante car l’ambiance globale est assez proche de la série originelle (même si les mises en scène autour du narrateur pour tenter de l’intégrer à l’environnement de l’épisode me semblent un peu vaines). La photographie est extrêmement léchée, les acteurs sont absolument crédibles et le twist de fin d’épisode est toujours très surprenant, comme à l’époque. Ce qui ne gâche rien, c’est qu’il ne s’agit pas d’un simple remake d’épisodes, mais bien d’une relecture d’histoires replacées dans le contexte actuel et c’est plutôt malin. Sincèrement, j’ai hâte de voir la suite, même si sans Rod Serling, la Twilight Zone n’est pas tout à fait la Twilight Zone…
Enfin, la soirée de clôture, rythmée par un Pablo Mira au top de sa forme a vu la projection des deux premiers épisodes d’Hanna, nouvelle série d’Amazon Prime Video. Alors qu’elle est enlevée par Erik dans un centre gouvernemental, Hanna et son père doivent fuir leurs poursuivants. Durant de nombreuses années, ils vont vivre dans une montagne entourée d’une épaisse forêt. A 16 ans, la jeune fille a été formée par Erik pour être une véritable survivante. Mais Hanna se pose de plus en plus de question et fini par s’aventurer un peu trop loin dans la forêt où elle est repérée. Séparée de son père, elle va devoir vivre un voyage à travers l’Europe pour tenter de sauver leurs vies et trouver réponses à ses questions.
On attendait probablement quelque chose d’un peu plus poussé scénaristiquement pour ces retrouvailles entre Mireille Enos et Joel Kinnaman (The Killing). Si Hanna n’est pas une série désagréable à regarder, elle privilégie l’action et les (gros) rebondissements aux dépends de l’exploration des personnages et de leur psychologie. Ceci étant, la série est assez joliment filmée, les acteurs sont impeccables, l’histoire est prenante. Si elle ne laissera probablement pas un souvenir impérissable, la série d’Amazon se laisse regarder avec plaisir.
Et il est temps de vous révéler le palmarès de cette édition de Séries Mania, la deuxième à Lille Hauts-de-France. Pour la compétition officielle, c’est l’incroyable The Virtues qui remporte le grand prix, ainsi que le prix du meilleur acteur pour Stephen Graham, son interprète principal. Le prix spécial est attribué à l’israélienne Just For Today dont Sophie vous avait parlé précédemment tandis que le prix de la meilleure actrice est remis à Marina Hands dans Mytho. Mytho qui repart également avec le prix du public.
En compétition française, le prix de la meilleure série va à Une Île pour Arte, celui de meilleure actrice à Carole Weyers dans Double Je, et celui de meilleur acteur à Grégory Montel dans Le Grand Bazar. Dans le panorama international, le prix de la meilleure série est attribué à Exit, tandis que dans la compétition des formats courts, c’est People Talking qui repart avec la statuette. Enfin, le prix de la meilleure comédie revient à la québécoise « M’entends-tu ».
C’est sur ce palmarès que se referme ce Red Carpet et cette édition 2019 plutôt réussie de Séries Mania.
Red Carpet
Le Podcast
Intervenant: Alexandre Marlier.
Durée: 14’25 min.
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